Socotra (en arabe et en langue mehri : سقطرى, soqotra) est une île du Yémen située dans l'Océan Indien, non loin de l'entrée orientale du Golfe d'Aden.
Cet article possède des paronymes, voir Socatra et Soqotri.
Pour l'archipel, voir archipel de Socotra. Pour le rocher en mer Jaune, voir rocher de Socotra.
Socotra سقطرى (en arabe) Soqotra (en mehri) | |
![]() Image satellite de Socotra. | |
Géographie | |
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Pays | ![]() |
Archipel | Archipel de Socotra |
Localisation | Mer d'Arabie (océan Indien) |
Coordonnées | 12° 31′ N, 53° 55′ E |
Superficie | 3 579 km2 |
Point culminant | Monts Haghier (1 525 m) |
Géologie | Île continentale |
Administration | |
Gouvernorat | Socotra |
Démographie | |
Population | 42 842 hab. (2004) |
Densité | 11,97 hab./km2 |
Plus grande ville | Hadiboh |
Autres informations | |
Découverte | Préhistoire |
Fuseau horaire | UTC+3 |
Îles au Yémen | |
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Elle se trouve à 234 kilomètres au large du cap Guardafui qui constitue l'extrémité nord-est de la Somalie et à 352 kilomètres au sud-est des côtes du gouvernorat d'Al Mahrah, au Yémen. Elle est la plus grande île de l'archipel de Socotra composé d'Abd al Kuri, Darsah, Samhah et les îlots rocheux de Sabuniyah et Ka'l Firawn. Socotra mesure 133 kilomètres de longueur, une quarantaine de kilomètres de largeur pour une superficie de 3 579 km2. En raison de sa biodiversité et de la présence de quelque 700 espèces uniques au monde, elle est inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco au sein de l'archipel de Socotra et a été déclarée réserve de biosphère en 2003 par l'Unesco[1].
Selon Edresi, géographe arabe du XIIe siècle, Alexandre le Grand, incité par Aristote, y aurait installé une colonie ionienne après avoir conquis l'Égypte[2].
Dans Le Périple de la mer Érythrée datant du Ier siècle, l'île est nommée Dioscoride (Dioscoridis Insula, signifiant en koinè île des Dioscures). Elle est décrite comme grande, semi-déserte et marécageuse, et possédant quelques rivières. La faune est composée de serpents, de grands lézards et de tortues. Ses habitants, chrétiens nestoriens, sont un mélange d'Arabes, de Grecs et d'Indiens, pêcheurs et marins. Ils sont peu nombreux et vivent sur la côte septentrionale. Des ermites vivent dans les haghiers (creux dans le grès) du sud de l'île[3].
Vers 520, l'île est un comptoir égypto-byzantin[4] qui commerce avec les chrétiens de Kerala, en Inde, en contournant l'empire Perse ennemi des Byzantins[5].
Le Portugal, alors en expansion dans l'océan Indien et la mer Rouge, y fonde un comptoir commercial en 1505[6]. Les Portugais se servent de l'île comme d'une base pour défier les Mamelouks d’Égypte et rançonner les boutres marchands arabes[7]. Ce comptoir est disputé par la suite entre les Hollandais et les Portugais ; après avoir été quelque temps un repaire de pirates, l'île passe en 1886 au pouvoir des Anglais, intégrée jusqu'en 1967 au protectorat du somaliland. De 1967 à 1990 elle etait disputé entre la republique de la Somalie et la République démocratique populaire du Yémen, période durant laquelle elle serait devenue une base militaire soviétique, selon les autorités américaines[8]. Mais les conditions météorologiques et maritimes difficiles, connues depuis l'Antiquité (les vents de poussière notamment) font mauvais ménage avec les équipements électroniques[9] et la base soviétique s'est limitée, à la fin de la Guerre froide, au petit port et à une modeste station-relais de communications ; ce que les satellites espions américains avaient photographié s'est révélé n'être que ferraille, leurres et décors visant à camoufler la vétusté des installations, pour la plupart abandonnées depuis des années[10],[11].
Pendant la période de la guerre civile de la Somalie à partir de 1987, les gouvernements du yémen avec qui la revendication de l'ile était toujours un cas de litige géostratégique avec la Somalie en ont profité pour faire passer une motion d'appartenance exclusive de l'ile comme faisant partie de son territoire.
À partir de 2015, la guerre civile yéménite affaiblit la souveraineté du Yémen sur l'île et les Émirats arabes unis commencent à administrer, voire coloniser de fait Socotra, construisant de nouvelles infrastructures, des réseaux de télécommunication, offrant aux habitants des contrats de travail, faisant leurs propres recensements de la population locale, puis, en 2018, occupant militairement l'île malgré les protestations du gouvernement yéménite[12]. Le , des troupes saoudiennes débarquent à leur tour, à la demande du gouvernement yéménite, officiellement pour former ses troupes[13], puis les deux forces se retirent au profit de l'armée gouvernementale dès le lendemain [14].
En , le gouvernement yéménite a accusé les Émirats arabes unis de débarquer une centaine de soldats séparatistes à Socotra, ce que les Émirats arabes unis ont nié, creusant un fossé entre les deux alliés nominaux dans la guerre civile au Yémen[15].
En , un régiment de l'armée yéménite stationné à Socotra s'est rebellé et a prêté allégeance au Conseil de transition du Sud séparatiste soutenu par les Émirats arabes unis à Socotra, renonçant au gouvernement de Abdrabbo Mansour Hadi soutenu par l'ONU[16]. Le , le CTS annonce prendre le contrôle de Socotra[17].
Socotra est une île d'origine continentale. L'île faisait partie de l'ancien continent Gondwana et se détacha au milieu du Pliocène il y a environ 6 millions d'années lors de la même distension continentale qui ouvrit le golfe d'Aden au nord-ouest.
Elle est la plus grande île de l'archipel de Socotra composé d'Abd al Kuri, Darsah, Samhah et les îlots rocheux de Sabuniyah et Ka'l Firawn. Hormis Socotra, la plupart de ces petites îles sont inhabitées et abritent de nombreux oiseaux.
Socotra est constituée d'une étroite plaine côtière, d'un plateau de grès truffé de cavernes karstiques et de montagnes, les Haghier, s'élevant jusqu'à 1 525 mètres d'altitude. L'île mesure environ 140 kilomètres de longueur, une quarantaine de kilomètres de largeur pour une superficie de 3 579 km2.
Socotra est à 100 km des côtes somaliennes contre 350 km du Yemen. Elle est revendiquée par la Somalie du fait de son histoire, de sa distance et de sa population.
Socotra possède un climat tropical, désertique et semi-aride (classification de Köppen : BWh et BSh).
Le climat chaud de Socotra est fortement influencé par les moussons. Les zones basses (les côtes ainsi qu'un bassin intérieur situé au centre de l'île) sont très sèches, tandis que les plateaux sont régulièrement arrosés.
La mousson d'été, qui dure de mai à septembre, n'apporte pas de pluies, mais des vents violents du sud-ouest qui atteignent des moyennes de 60 km/h à 100 km/h et rendent l'accès à l'île difficile par mer ou par air.
De novembre à mars, la mousson du nord-est apporte des pluies, parfois torrentielles, mais aussi des vents, moins violents mais souvent chargés de fines poussières. Les hauts plateaux sont dans la brume et bien arrosés. Les régions côtières connaissent de fortes averses sporadiques. Novembre et décembre sont les mois les plus frais de l'année, avant le retour de la chaleur dès janvier.
De fin mars à début mai, une saison de transition apporte des pluies bien réparties sur toute l'île. Ce sont les plus profitables de l'année pour la végétation. Les vents sont faibles et c'est paradoxalement la période la plus chaude.
L'archipel est rarement touché par des tempêtes, mais des cyclones peuvent occasionnellement le traverser [18].
Mois | jan. | fév. | mars | avril | mai | juin | jui. | août | sep. | oct. | nov. | déc. | année |
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Température minimale moyenne (°C) | 16,8 | 18,3 | 19,8 | 22,2 | 23,7 | 24,1 | 23,2 | 22,8 | 22,6 | 20,6 | 18,7 | 17,5 | 20,9 |
Température moyenne (°C) | 22 | 23,4 | 25,1 | 27,5 | 28,9 | 29 | 27,6 | 27,5 | 27,6 | 26 | 24,2 | 22,7 | 26 |
Température maximale moyenne (°C) | 27,2 | 28,5 | 30,5 | 32,7 | 34,2 | 33,9 | 32 | 32,3 | 32,7 | 31,4 | 29,8 | 28 | 31,1 |
Précipitations (mm) | 23 | 18 | 14 | 22 | 37 | 18 | 12 | 15 | 27 | 38 | 18 | 16 | 258 |
Nombre de jours avec précipitations | 2 | 2 | 2,1 | 3,4 | 4,1 | 6 | 9,7 | 9,3 | 4,9 | 3,2 | 3 | 3 | 52,7 |
Humidité relative (%) | 20 | 21 | 24 | 27 | 29 | 29 | 28 | 27 | 27 | 25 | 22 | 21 | 25,2 |
Deux bras de mer ont séparé au Quaternaire l'archipel des deux continents africain et asiatique, induisant une évolution des espèces végétales et animales en vase clos[24] jusqu'à ce que les humains introduisent de nouvelles espèces telles que les chèvres. Les recensements ont révélé que plus d'un tiers des 800 et quelques espèces de plantes de Socotra sont endémiques. Les botanistes rangent la flore de Socotra parmi les dix flores insulaires les plus menacées du monde.
Socotra est considérée comme le joyau de la biodiversité de la mer d'Arabie[25]. Dans les années 1990, une équipe de biologistes des Nations Unies a mené une enquête sur la flore et la faune de l'archipel. Près de 700 espèces endémiques y ont été recensées ; seules la Nouvelle-Zélande[26], Hawaii, la Nouvelle-Calédonie et les îles Galápagos surpassent ce nombre[27].
Le long isolement géologique de l'archipel de Socotra, sa chaleur extrême et sa sécheresse, se sont combinés pour créer une flore endémique unique et remarquable. Des études de terrain menées par le Centre pour les plantes du Moyen-Orient, appartenant au Jardin botanique royal d'Édimbourg, indiquent que 307 espèces de plantes sur 825 (37 %) de Socotra sont endémiques, c'est-à-dire qu'on ne les trouve nulle part ailleurs sur Terre[28]. L'ensemble de la flore de l'archipel de Socotra a été reporté dans la liste rouge de l'UICN, avec 3 espèces de plantes en danger critique d'extinction et 27 espèces de plantes menacées d'extinction reconnues en 2004[28].
L'une des plantes les plus originales de Socotra est le dragonnier de Socotra (Dracaena cinnabari), un étrange arbre en forme de parapluie. Sa sève rouge, présentée comme le sang des dragons mythiques, était recherchée comme colorant et est aujourd'hui utilisée comme peinture et vernis[28]. Les divers aloès endémiques de Socotra, utilisés en médecine et en cosmétique, étaient également importants dans l'Antiquité. Parmi les autres plantes endémiques figurent la une moracée pachycaule Dorstenia gigas, l’arbre-concombre Dendrosicyos socotranus, les rares grenadiers socotrans ( Punica protopunica ), Aloe perryi et Boswellia socotrana[29].
L'archipel a aussi une riche faune, dont plusieurs espèces endémiques d'oiseaux, comme le Rufipenne de Socotra (Onychognathus frater), le Souimanga de Socotra (Nectarinia balfouri), le Bruant de Socotra (Emberiza socotrana), la Cisticole de Socotra (Cisticola haesitatus), Moineau de Socotra ( Passer insularis ), Grand-verdier de Socotra ( Rhynchostruthus socotranus ) et une espèce d’un genre monotypique, la Cisticole pâle ( Incana incana )[29]. De nombreuses espèces d'oiseaux sont menacées par la prédation par des chats sauvages non indigènes[27]. Avec un seul mammifère endémique, 6 espèces d'oiseaux endémiques et aucun amphibien, les reptiles constituent la faune de vertébrés de Socotran la plus représentative avec 31 espèces. Si l’on exclut les deux espèces récemment introduites, Hemidactylus robustus et Hemidactylus flaviviridis, toutes les espèces indigènes sont endémiques. L'endémisme est très élevé à la fois au niveau des espèces (29 sur 31, soit 94 %) et au niveau des genres (5 sur 12, soit 42 %). Au niveau des espèces, l'endémicité peut être encore plus élevée, des études phylogénétiques ayant révélé une diversité cachée non négligeable[30]. Les espèces de reptiles comprennent les scinques, les lézards sans jambes et une espèce de caméléon, Chamaeleo monachus . Il existe de nombreux invertébrés endémiques, dont plusieurs araignées (telles que la tarentule Monocentropus balfouri ) et trois espèces de crabes d'eau douce (un Socotra et deux Socotrapotamon )[31].
Comme dans de nombreux systèmes insulaires isolés, les chauves-souris sont les seuls mammifères originaires de Socotra. En revanche, les récifs coralliens de Socotra sont variés, avec de nombreuses espèces endémiques[29]. Socotra est également un des milieux hébergeant le papillon Bicyclus anynana[32].
Au cours des deux mille ans d’établissements humains sur les îles, l’environnement a lentement et continuellement changé et, selon Jonathan Kingdon, « les animaux et les plantes qui restent ne représentent qu’une fraction dégradée de ce qui existait jadis[29] ». Le Périple de la mer Érythrée, qui est daté entre le Ier et le IIIe siècle, raconte que l'île abritait des crocodiles et de grands lézards : la faune reptilienne actuelle semble donc être considérablement réduite. Il y a quelques siècles à peine, l'île comptait des rivières et des zones humides, des stocks plus importants d'arbres endémiques et des pâturages abondants. Les Portugais ont enregistré la présence de buffles au début du XVIIe siècle. À présent, il n’y a plus que des ravins de sable, et de nombreuses plantes indigènes ne survivent que là où il y a plus d’humidité ou plus de protection contre le bétail[29]. La faune résiduelle de Socotra est fortement menacée par les chèvres et autres espèces introduites.
À la suite de la Guerre civile yéménite, Socotra a été isolée et les prix du gaz sont devenus élevés, ce qui a incité les habitants à exploiter le bois pour se chauffer. En , les Émirats Arabes Unis ont envoyé du gaz de cuisson aux résidents de Socotra afin de lutter contre la déforestation[33].
L'île constitue une écorégion terrestre dans la classification du Fonds mondial pour la nature sous le nom de « brousses xériques de l'île de Socotra ». Elle appartient au biome des déserts et brousses xériques de l'écozone afrotropicale et fait partie de la liste « Global 200 » du WWF qui regroupe les régions biogéographiques les plus représentatives de la biodiversité planétaire. Elle est inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco au sein de l'archipel de Socotra depuis 2008 et est considérée comme un point chaud de biodiversité par l'association Conservation International avec le reste la Corne africaine.
La plupart des habitants de l'archipel, au nombre de 42 842 en 2004, vivent à Socotra. La ville principale est Hadiboh avec une population estimée en 2004 à 8 545 habitants. Les autres villes sont Qulansiyah avec 3 862 habitants et Qād̨ub avec 929 habitants. Toutes les trois sont situées sur la côte Nord. Les îles d'Abd al Kuri et de Samhah ont une population de quelques centaines d'habitants, Darsah et les autres îles sont inhabitées.
La population est d'origine somalienne avec des métissages de différentes origines dont celles des différents conquérants de l'île, de religion musulmane sunnite et parle le soqotri, une langue non écrite, qui fait partie de la famille des langues sémitiques.
Les activités principales sont la pêche et l'élevage de bovins et de chèvres. Le climat ne permet que la culture de dattes, d'aromates et d'un peu de tabac. Les principaux produits commerciaux sont le ghî, du beurre clarifié, l'aloès et l'encens (Boswellia sp.). Récemment, le tourisme a pris de l'importance.
Population | Langage (si mentionné) | n | E1b1a | E1b1b | G | I | J | L | N | R1a | R1b | T | Référence |
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Socotra | AA (sémitique) | 63 | 0 | 9 [34] | 0 | 0 | 85,7 | 0 | 0 | 1,6 | 0 | 0 | Cerny2009[35] |
(AA = afro-asiatique)
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